Monter les marches en sortant du métro et penser à elle. Doucement, sourire, un peu tristement aussi, à cause de la distance. Tu es loin et je me sens vide. Se voir une fois par an. Ou deux. Mais c’est toujours insuffisant en réalité. Refaire le monde, sur la terrasse, là, dans le jardin, au soleil et sous le vent qui fait bouger les plantes fleuries.
Les deux chaises en bois, le café qui refroidit dans nos tasses, les clopes roulées et les blondes toutes faites, nous ont accueillies de nombreuses heures depuis toutes ces années. Nos années un peu folles, nos entrées dans l’âge adulte, celui qui montre bien que tu ne pourras jamais revenir en arrière. Les premiers impôts que tu paies alors qu’on avait avant une seule idée en tête, ne jamais oublier de respirer. Marie tu me manques. J’aimerais partager avec toi ce que je ne partage avec presque personne d’autre. Les versions édulcorées que je leur sers suffit amplement pour ce que je partage avec eux, personne ne mérite que je leur raconte mes cris, mes rires et mes larmes avec la même intensité que celle qui t’est réservée. Alors en dehors de nous, je ne parle plus. Avec toi c’est sans détours, sans omettre le moindre détail.
Avec nos sourires et la pluie, petit crachin breton qui manque à mes jours parfois. Souvent en ce moment. J’ai peur d’oublier les lignes de ton corps, les contours de ton visage même si les photos que je peux voir me font penser que jamais je n’oublierai la moindre ridule d’expression de tes mimiques ou de tes grimaces. Nous faisons toujours les mêmes promesses que la candeur de notre adolescence nous permettait. Nous évoquons toujours nos amours et nos emmerdes, comme si c’était hier.
Je viendrai, pour qu’on puisse marcher le long de l’eau, au soleil ou sous le pluie, qu’on écoute de la musique dans la voiture, qu’on puisse boire un verre de vin non loin du port. Je quitterai le gris de Paris pour te rejoindre. Je partirai loin d’ici pour quelques heures saines à tes côtés, en versant quelques larmes sur le quai de la gare. La distance est injuste alors je partirai pour la réduire, je prendrai une place en première et tu riras sans doute quand je te raconterai ma vaine tentative de goûter à la plaisante solitude des wagons de première classe : depuis tous ces aller-retours, tu sais que le train en seconde est aussi bruyant que la première et que « ceux qui payent plus cher ne sont pas toujours ceux qui sont les mieux élevés« .
On passera des moments heureux.
Et puis elle me ramènera à la gare, jusqu’à la prochaine fois. « Je reviendrai » je pleurerai dans ses bras. En montant dans le train, j’aurais du sable plein les poches et des coquillages dans le sac à main. Un jour je partirai, pour ne plus jamais avoir à revenir. Pour ne plus jamais être loin.
C’est un texte sur le Go de FranchRedFrog.
Joli.