On a tous une période de notre vie où on se sent invincible. On crie, on rit et on jouit. On a tous eu cette étrange sensation que rien ne pourra nous atteindre, les mots les coups les sourires, on marche sur le monde, on méprise plus petit que soi et on admire l’aîné semblable à un proche qu’on aurait jamais eu. On court plus vite que les secondes qui défilent. C’est grisant, c’est dingue tellement c’est vivant Docteur. On en devient insupportable et méprisable finalement, on est hermétique aux critiques qui diraient que c’est une question d’éducation. En réalité on crache sur la terre entière qui tourne dans le mauvais sens parce que la révolution qu’elle fait a lieu dans un sens différent du notre. Je ne cherche pas l’excuse de jeunesse, il n’y a pas d’âge, Docteur, pour être un sale con.
On a tous des moments indécents. On a tous des instants de contresens entre qui on est et qui on croit représenter, loin d’être finalement sincère, à mille lieux de celui qu’on devrait être. Je traversais cette période. J’allais avoir vingt ans. J’etais très en colère. Et du jour au lendemain j´ai compris que personne ne pouvait être invincible et que le mépris que j’avais jusqu’alors ressenti pour chacun que j’avais croisé n’était rien quand on pouvait être anéanti d’une seule gifle. Docteur, j’ai eu vingt ans et j’allais rencontrer quelqu’un qui ne tarderai pas à mourir et méprisait des gens comme moi. Elle m’a quitté. Elle n’est aujourd’hui plus là pour m’entendre me repentir. C’est con hein.